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Journal | Août 2021

 
  • dimanche 1er,
Bergman Island
Bergman Island

Bergman Island, film de Mia Hansen-Løve, 2020

Un film qui parle de cinéma, de Bergman et se passe à Fårö, faut dire que c’est bien tentant... mais les jeunes réalisateurs qui viennent là en résidence pour bénéficier de l’aura des lieux et du Maître, ça me semble déjà plus savonneux tant l’écueil de la présence étouffante paraît inévitable. Et effectivement. La recherche sur le brouillage progressif entre le réel (le scénario du film qu’on regarde, où les personnages des cinéastes sont joués par Mia Wasikowska et Tim Roth), et les images des films des cinéastes du film (les personnages de ces scenarii étant joués par d’autres acteurs) est intéressant, si le film ne nous offrait pas à plusieurs reprises une redite un peu lourde lorsqu’à mon sens l’effet miroir aurait pu être montré de façon plus adroite. En ressort plus un embrouillamini d’entre-soi plutôt indigeste. La recherche autour de ce qui se passe chez les personnages est intéressante également, mais n’évite pas les poncifs. Restent les paysages de l’île, la maison de Bergman, les plans repris à Bergman, l’ombre de Bergman, omniprésente, et malgré la douce critique de l’exploitation commerciale de l’empreinte du titan avec le Festival Bergman, difficile de ne pas se dire, sans tomber dans le mauvais esprit (oui, c’est sans doute un film qui aimerait pouvoir aussi connaître une exploitation commerciale...) que le film fait peut-être plus le job de l’office du tourisme de l’île (c’est vrai que c’est chouette ! et en plus, quand on aime Bergman...). Une coquille assez vide dont il me restera de belles images et des sensations dignes d’un échantillon testeur. J’insiste cependant, c’était tout de même un sujet particulièrement casse-gueule, il aurait tenu du tour de force d’en faire un bon film, à mon mon plus honnête et humble avis.

 

 
  • jeudi 5,
Nomadland
Nomadland

Nomadland, film de Chloé Zhao, 2020, adapté du roman de Jessica Bruder, 2019

ENFIN ! Des semaines que je lui courais après, suite à plusieurs loupés de séances, empêchements et autres, et aux retours dithyrambiques des chanceux et chanceuses proches qui, eux, ne l’avaient pas loupé.
Et je n’ai pas été déçue. Surprise, parce que j’attendais à un autre type de propos, mais une superbe surprise !! Film superbement réalisé, avec une Frances McDormand confondante de vérité et toute une constellation d’individus tout aussi beaux et justes jouant leurs propres rôles, une image historique, économique, sociale et sociétale d’une partie des États-Unis d’aujourd’hui, où de nombreuses personnes sont obligées faute de pouvoir continuer à payer leurs loyers et/ou faute de moyen de subsistance d’emménager dans des véhicules plus ou moins aménagés, suivant la transhumance des contrats saisonniers et précaires chez Amazon ou dans les resorts touristiques. Une image qui à mon sens tendra de plus en plus à se généraliser (sous un large éventail de formes, pas forcément liée à une sorte de misérabilisme) comme un mode de vie courant dans nos sociétés en pleine transition pour s’adapter à des environnements de plus en plus mouvants et précaires, tant au niveau économique que climatique. Premier niveau, qui déjà aurait de quoi bien occuper un scénario standard.
Mais ce que j’ai le plus aimé, c’est la transformation de cette situation subie, cet exil vers nulle-part, en un art de vivre de plus en plus détaché de l’aspect matérialiste et du système consumériste qui fait — encore pour quelques temps, mais peut-être pas tant — les affaires des financiers, pour un retour à une vie plus spirituelle, une vie bonne, et simple, au sens philosophique du terme, dans ces ébauches de sociétés rafistolées par d’anciens naufragés par amalgame de débris, certes, mais aussi, et surtout, par le rassemblement de visages et histoires humaines. Faut-il avoir été amoché par la vie pour en arriver à cette sagesse, car ils sont loin d’être fous, bien au contraire, à nous rappeler que, tout bien considéré, nous ne sommes ici que de passage.

J’irai bien volontiers laisser mes yeux se promener sur les lignes du roman, à l’occasion, histoire d’en reprendre un bout et d’approfondir encore.

 

 
  • vendredi 6,
Murderabilia
Murderabilia

Murderabilia, bande dessinée d’Alvaro Ortiz, 2015, Rakham

Le jeune Malmö va vendre les chats de son oncle décédé à un étrange collectionneur avec lequel il va se lier d’amitié. Pas qu’avec lui d’ailleurs, puisqu’il fait aussi la connaissance d’une amoureuse et intègre plus ou moins la bande. Pour quelqu’un qui cherchait des choses à vivre et à raconter, pour un écrivain en devenir, il est servi ! Drôle et morbide, cette bd ne me laissera cependant pas un souvenir marquant. J’ai trouvé sur un avis SensCritique de Gritchh un parallèle avec L’étranger, et c’est vrai que le propos tient de l’absurde, entre autres, mais perso, je préfère autant quand c’est Camus qui en parle, à moins d’un approfondissement actualisé sur notre besoin de spectaculaire obscène et ce que cela révèle de l’état du monde et de notre société... Je resterai donc sur un « moui » timide, hommage sans doute aux gentils chatons.

 

La tendre indifférence du monde Laskovoe Bezrazlichie Mira
La tendre indifférence du monde Laskovoe Bezrazlichie Mira

La tendre indifférence du monde Laskovoe Bezrazlichie Mira, film de Adilkhan Yerzhanov, 2018

Retour à Camus, la transition était trop belle et même pas préméditée, personnage à part entière de ce poème graphique et littéraire, dont les citations sont nombreuses, et à qui l’on doit le titre, comme une exergue, directement extrait de L’étranger (oui, encore), voilà qui donne le ton. Conte moderne qui montre le combat permanent des âmes pures qui souhaiteraient le rester face à la corruption et au cynisme d’un monde désabusé (et pas qu’au Kazakhstan). On aimerait que les rêveurs gagnent... Jouant sur les symboles forts, les couleurs, la composition du cadre où la caméra, elle aussi, devient personnage, narrateur silencieux (oui, toujours, certes, mais là plus qu’ailleurs), une leçon de cinéma qui nous montre qu’avec ce talent-là, il est possible de réaliser une œuvre importante, toute en finesse, et d’une beauté picturale impressionnante.

 

 
  • samedi 7,
In Waves
In Waves

In Waves, roman graphique d’AJ Dungo dans la traduction de Basile Béguerie avec Jean-François Rey au lettrage (rares sont les éditions à donner toutes ces informations, merci à eux !), 2019, Casterman

Dans cet ouvrage imposant, AJ Dungo mêle deux récits en parallèle : d’une part, bicolore dans les tons marron (entre bois et sable), une histoire du surf, depuis les premiers Maoris à pratiquer ce qui ressemble plus à une communion avec les éléments et les esprits qu’à une simple activité physique à nos jours en appuyant son récit par un hommage à deux pionniers d’un véritable art de vivre, Duke Kahanamoku et Tom Blake ; de l’autre, bicolore dans les tons bleus, bien sûr, un retour tout en délicatesse et pudeur sur la relation entre l’auteur lui-même et son amoureuse de toujours, Kristen, qui lui a fait découvrir cette pratique, des premiers regards échangés jusqu’aux derniers instants d’un combat trop difficile contre la maladie, se remémorant les rires, les émerveillements, les hésitations, les échecs et les réussites, et aussi dans l’évocation pudique de l’hébétude, du manque, du chagrin, les hauts et les bas, toutes ces émotions, ces mouvements qu’il faut apprendre à accompagner en douceur, et à surmonter comme autant de vagues. Rarement vu une telle adéquation entre fond et forme, beauté graphique autant que de la sagesse qu’elle dispense, en simple partage d’expérience et de ressentis, lorsque l’intime touche l’universel, et saisie par les émotions suscitées par la lecture, de l’ordre ici de la bonté, la bienveillance, l’accueil et l’adaptation permanente et fluide, qui donnerait bien volontiers l’envie d’adopter le mode de pensée et d’être des surfeurs (si ce n’était déjà un peu le cas...)

Un grand merci à qui me l’a mis dans les mains.

Laisser venir la prochaine vague

 

 
  • dimanche 8,
Rose
Rose

Rose, bande dessinée d’Émilie Alibert, Denis Lapière et Valérie Vernay, 2017-2019, 3 tomes, Dupuis

C’est marrant ce que le hasard — ou qu’importe le nom qu’on choisisse d’y donner — peut donner à une simple bd que l’on vous met dans les mains pour tout autre chose une résonance intime inattendue et fort à propos... Soit.
Suite à l’assassinat de son père détective privé retrouvé sur une plage dans une sombre mise en scène, Rose reprend le flambeau et l’enquête en cours, particulièrement sensible et dangereuse mêlant complot industriel et révélations familiales, avec une couche de surnaturel bien dosée. Un récit sympathique et haletant, bien écrit et aux belles lignes et textures de Valérie Vernay, que je ne peux m’empêcher de rapprocher de l’excellent La mémoire de l’eau, que j’avais beaucoup aimé donc, et auquel la même Valérie Vernay officiait déjà. Si rien n’interdit les adultes de prendre plaisir à sa lecture, je pense qu’elle ravira plus sûrement les jeunes adolescents.

 

Corto Maltese : La Cour secrète des arcanes
Corto Maltese : La Cour secrète des arcanes

Corto Maltese : La Cour secrète des arcanes, film de Pascal Morelli, 2002

Est-ce le rythme, la voix ici monocorde de Richard Berry, la platitude du rendu de l’univers de Pratt... je crois que je me suis endormie... au moins j’aurais sainement occupé mon temps 0 :)
 
 

 

 
  • mardi 10,
 Dans la tête de Sherlock Holmes T.1 L'Affaire du Ticket Scandaleux 1/2
Dans la tête de Sherlock Holmes T.1 L’Affaire du Ticket Scandaleux 1/2

Dans la tête de Sherlock Holmes T.1 L’Affaire du Ticket Scandaleux 1/2, bande dessinée de Cyril Liéron et Benoit Dahan, 2019, tome 2 à paraître le 24 septembre 2021, Ankama Éditions

Ça fait tellement longtemps que je n’avais eu entre les mains un projet se jouant de l’objet livre, et jouant avec, comme le fait ce Dans la tête de Sherlock, que le plaisir se transforme en véritable jouissance. Un vrai projet éditorial, mené semble-t-il au meilleur de ses possibilités apr les équipes d’Ankama, et bien sûr les auteurs de cette pépite. Il fallait en plus que ce soit une aventure de Sherlock... :)

 

 
  • mercredi 11,
Les beaux étés T.2
Les beaux étés T.2

Les beaux étés T.2, bande dessinée de Jordi Lafebre et Zidrou, 2015- en cours, 6 tomes parus, Dargaud

Une « feel good » BD pour paraphraser l’expression maintenant consacrée aux accents de la nostalgie des étés d’enfance passés ou rêvés, et de la joie de partager ceux de la famille Faldérault, et les plaisirs simples mais si satisfaisants.

 

 
  • mardi 17,
Longue vie
Longue vie

Longue vie, bande dessinée de Stanislas Moussé, 2020, Éditions Le Tripode

Étrange lecture, continuée sans trop comprendre où allait l’histoire et voulait en venir son auteur, entre grande fresque héroïque et planches pleine page bourrées de micro-histoires secondaires, façon Où est Charlie, le tout muet et en noir et blanc. Déconcertant même, jusqu’à la toute fin. Oui, malgré les difficultés à donner sens à tout cela, lecteurs jusqu’au-boutistes comme je peux l’être accrochez-vous, Longue vie vous délivrera tout son sens une fois l’histoire terminée, et c’est là tout l’intérêt du propos. Un beau pied de nez. ;)

 

Fahrenheit 451
Fahrenheit 451

Fahrenheit 451, film de François Truffaut, 1966

Fahrenheit 451
Fahrenheit 451

De mémoire, je crois que j’ai rarement vu adaptation littéraire plus fidèle (voire mot à mot ?), particulièrement en SF... Est-ce là un défaut ? J’ai passé pour ma part un « très bon moment », et si la lecture de Fahrenheit 451 vous ennuie, ruez-vous donc sur le film !!! et sinon, ben ruez-vous sur les deux !
 

 

 
  • mercredi 18,
Jujitsuffragettes, les Amazones de Londres
Jujitsuffragettes, les Amazones de Londres

Jujitsuffragettes, les Amazones de Londres, bande dessinée de Lisa Lugrin et Clément Xavier, 2020, Delcourt

BD sympa, à mes yeux surtout intéressante pour l’abord historique de faits peu connus (en tous cas que j’ignorais), au-delà de l’anecdote. À découvrir donc, même si je n’en ferais pas mon ordinaire (n’ayant jamais été fan des bd documentaires ou historiques).

 

 
  • vendredi 20,
Le dernier des Mohicans The Last of the Mohicans
Le dernier des Mohicans The Last of the Mohicans

Le dernier des Mohicans The Last of the Mohicans, film de Michael Mann, 1992

Ce qui m’a le plus frappée en (re)voyant ce film, c’est de voir à quel point certaines images (de 1992), par leur lumière, leurs nuances de couleurs, le cadre, l’atmosphère qu’elles véhiculent, semblent être des émanations des ouvrages BD de Patrick Prugne (Canoë Bay, 2009 ; Frenchman, 2011 ; Pawnee, 2013 ; Iroquois, 2016 ; Tomahawk, 2020). Ce qui prouve que le voyage temporel existe. À moins que.
À part ça, revoyure très sympa (en gardant à l’esprit qu’il s’agit d’un film très marqué par les années 90).

 

 
  • samedi 21,
Le fils du roi
Le fils du roi

Le fils du roi, bande dessinée de Stanislas Moussé, 2021, Éditions Le Tripode

Pfff... bon, là honnêtement, j’ai continué aussi (à peu près même format que Longue vie, toujours muet noir et blanc), mais j’ai toujours pas trouvé. Ce qui n’enlève rien au bien que je pense de l’ouvrage cité plus haut.

 

 
  • lundi 23,
Alphonse Mucha, la Beauté Art Nouveau
Alphonse Mucha, la Beauté Art Nouveau

Alphonse Mucha, la Beauté Art Nouveau, exposition au Musée Départemental Breton, Quimper, du 18 juin au 19 septembre 2021

Très chouette et intéressante expo. Une belle découverte pour ma part. Seul regret, qu’il n’y ait pas eu plus de repères biographiques en rapports aux autres indications contextuelles, qui auraient je pense s’avérer éclairants sur le parcours de l’artiste, pour les non spécialistes.

 

Under the Skin
Under the Skin

Under the Skin, film de Jonathan Glazer, 2014

Étrange expérience, à revoir à tête reposée. Là encore, tout prend sens à la toute fin.
 
 
 
 

 

 
  • mardi 24,
Les Sous-sols du Révolu
Les Sous-sols du Révolu

Les Sous-sols du Révolu, bande dessinée de Marc-Antoine Mathieu, 2006, Futuropolis, collection Musée du Louvre

La collaboration entre Futuro et le Musée du Louvre avec des artistes invités donne parfois vie à des pépites. Ici, Marc-Antoine Mathieu retourne le musée comme un gant et dans tous les sens (vraiment dans tous les sens, mais c’est un de ses domaines de prédilection) et c’est un régal du début à la fin (à mes yeux). C’est vrai que je ne suis pas d’une grande objectivité concernant Marc-Antoine Mathieu, je trouve beaucoup de ses ouvrages — et sa vision des choses, sa façon de déconstruire le réel et de jouer avec — assez géniaux, celui-ci dans le trio de tête.

 

Antiviral
Antiviral

Antiviral, film de Brandon Cronenberg, 2012

Le postulat de départ est un peu particulier : après avoir collectionné les autographes, les selfies ou les petites culottes de ses stars préférées, le public peut maintenant, grâce à une simple injection, partager avec elles leurs maux du quotidien, plus ou moins sérieux. Rhume, herpès, les voies du succès sont impénétrables, jusqu’au dérapage. Mais après tout pourquoi pas. Seulement, ne s’appelle pas Cronenberg qui veut. À sa décharge, un sujet aussi casse-gueule, sur un premier long-métrage de fiction, fallait oser, et ce ne doit pas être facile de passer après un autre Cronenberg. Je n’ai pas aimé celui-ci, mais je verrai tout de même volontiers ses films suivants, Possessor (2020) et Infinity Pool (à sortir).

 

 
  • mercredi 25,
La véritable histoire de Futuropolis
La véritable histoire de Futuropolis

La véritable histoire de Futuropolis, bande dessinée de Florence Cestac, 2007, Dargaud

Je ne suis, en général, vraiment pas fan du dessin de Cestac. Et cette fois-ci pas plus. Mais au moins, j’en sais un peu plus sur l’histoire de Futuropolis, vu depuis sa fenêtre à elle, et c’est déjà pas mal !

 

 
  • samedi 28,
Mad Max : Fury Road
Mad Max : Fury Road

Mad Max : Fury Road, film de George Miller, 2015

Séance en plein air, dans un contexte particulièrement sympathique, c’est vrai que ça aide. Mais y a pas que ça. Après plusieurs visionnages, où je vois quelques sourires en coin, certes justifiés par la surenchère et le grandiloquent. Mais pu... ces plans, ces couleurs, la galerie des personnages, les décors, la musique et sa mise en scène, toute la symbolique, voire la mythologique, que le scénario convoque, et les trouvailles... pour moi ça tient du lyrisme, et oui, j’en redemande avec plaisir !

 

 

 

 

Première mise en ligne 10 septembre 2021, dernière modification le 19 novembre 2023

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